Seul passage facile d'Est en Ouest, la « trouée de Taza » fut de tout temps, comme son nom (dérivé du berbère « tizi » signifiant passage) l'indique, un couloir d'invasion pour l'Afrique du Nord. Les Romains, les Arabes l'empruntèrent ; maintes fois elle vit le flux et le reflux des conquérants berbères. Dès le 10, s. les Meknassa bâtissent à l'entrée de cet important couloir un couvent fortifié, destiné à barrer la route aux envahisseurs venant de l'Est. Tombée aux mains des sultans dès le siècle suivant, Taza devient une puissante citadelle : elle sera désormais une pièce maîtresse entre les mains des différentes dynasties.
Taza correspond à une superposition des différentes strates des civilisations qui se sont succédées au Maroc, au fur et à mesure des invasions et des conquêtes.
Taza préhistorique, tout d’abord, est représentée par la grotte de Kifan Bel Ghomari, où ont été mis au jour des silex taillés de toutes sortes (grattoirs, racloirs, pointes de flèches…) ainsi que des sépultures taillées dans le roc. Tout indique par conséquent que cette civilisation avait pour caractéristique les travaux dans les rochers.
A l’époque berbère, Taza constitue tout d’abord un simple oppidum puis devient une véritable forteresse lorsque les rois, au faîte de leur puissance, purent affronter Rome. De la confrontation avec la civilisation romaine, les Berbères ont rapporté leurs idées et leurs méthodes. De cette époque, datent en effet les fragments des remparts en moyen appareil, dont fait partie le Bordj El Melouloub ou Tour Sarrasine, à la forme remarquable. Comme certaines tours romaines, elle est d’abord rectangulaire vers le rempart puis demi-circulaire à l’extérieur.
Les Berbères ramenèrent également de Rome les techniques de la poterie, d’où la découverte de nombreux débris de poterie au lieu dit Sab El Mâ. On y trouve des lampes à huile, des burettes à huile, des pots à soupe, à couscous, des vases à anses, de petites amphores, au dessin généralement géométrique.
La conquête arabe se fit en deux étapes : au VIIIème siècle puis au XIè, qui correspond à une période de destruction avec l’invasion hilalienne qu’Ibn Khaldoun décrit en ces termes : « comme un vol de sauterelles, ces avides conquérants ne laissaient rien derrière eux ». "Ces avides conquérants", c’est-à-dire les Beni Hilal et les Beni Soleïm, nomades originaires du Hedjaz, envahirent et pillèrent tour à tour l’Arabie, l’Egypte et enfin l’Ifrikya. Se succèdent alors les Almoravides puis les Almohades, parmi lesquels Abd El Moumen, qui résida longtemps à Taza.
Sous son égide, une enceinte en tabia remplace le rempart antique berbère, tout en en utilisant les ruines et en en conservant les portes. A la fin du XVème siècle, l’art subit les influences européennes et plus particulièrement une influence hispano-portugaise symbolisée à Taza par El Bastioun notamment. Cette construction cubique en briques constitue un élément primordial de la défense. Sa façade est percée de quatre ouvertures de style roman, tandis qu’au deux tiers de sa hauteur totale, se situe une terrasse crénelée flanquée à droite et à gauche de deux tours carrées.